Le revenu de base (ou revenu universel) est déjà un vieux serpent de mer. Cette idée est apparue dès le XVIème siècle chez le philosophe Thomas More, puis reprise dans l’histoire par Napoléon ou encore Martin Luther King, notamment. L’idée est relativement simple : un revenu distribué de manière inconditionnelle à l’ensemble des « citoyens », chômeurs volontaires ou involontaires, travailleurs à temps plein ou à temps partiel, et cumulable avec d’autres revenus.
Sur le papier, ça paraît alléchant : Marx voyait un revenu socialisé universel face à un monde où seules les machines créeraient de la richesse. A partir de là, on peut imaginer une société ayant éradiqué la pauvreté, où chacun pourrait choisir son devenir ; faire le choix du non-travail et privilégier des activités non lucratives correspondant à ses sensibilités culturelles au sens large, ou simplement, travailler moins en privilégiant d’autres aspects de la vie.
Anguille sous roche. L’idée est revenue sur le devant de la scène en janvier lors de la remise du rapport du Conseil national du numérique qui préconise cette idée au vu des mutations économiques induites par le développement du numérique (42% des métiers – sur-tout à qualifications moyennes – seraient amenés à disparaître dans l’avenir). Ce qui n’est pas pour déplaire à certains qui y voient une formidable opportunité d’enfoncer le clou en allant plus loin dans une libéralisation forcenée de l’économie.
Dans la pensée libérale (magistralement maîtrisée par les élites socialistes), un individu à qui on donne un revenu de base, aurait désormais les moyens de s’assumer intégralement. Exit donc les mécanismes de solidarité collective et de péréquation des richesses (Impôts sur le revenu, Services publics gratuits, C. A. F. , A. P. L. , financement pour la formation, allocations diverses, Sécurité sociale…). Dans ce qu’il reste de notre système de protection sociale, adapter le versement aux besoins est un principe de solidarité, on verse plus si nécessaire. Dans une société du revenu de base, l’individu responsable assumera sur ces deniers… Ou ne pourra pas.
Qui dit liquidation de certains services publics d’« aide », dit dégraissage de fonctionnaires et donc baisse des impôts et surtout (par effet de vases clos) des charges des entreprises. N’oublions pas : la baisse du coût du travail parle transfert des « charges » sociales sur la consommation (T. V. A.), c’est la principale revendication du patronat et de la droite. Ce serait un glissement vers une fiscalisation à l’anglo-saxonne qui épargne le patrimoine et donc les plus riches, au détriment de la majorité de la population qui devra faire face à l’élévation des prix.
Le revenu de base n’est rien d’autre qu’une nouvelle aumône. C’est acheter la paix sociale et donner une vague illusion de choix de vie pour éviter les troubles sociaux et les révoltes. C’est maintenir l’ordre social établi. C’est relancer la consommation pour relancer les entre-prises et donc générer des dividendes pour les actionnaires. C’est prendre acte que le système capitaliste est triomphant.
Ce n’est pas d’aumône que nous voulons, c’est pouvoir librement nous assumer et être producteurs de nos vies !
Sitting-Boule