Ça y est c’est fait ! Les ronds de cuir du ministère de l’intérieur et du ministère de la défense doivent se réjouir, se congratuler, voire sabrer le champagne. Ils l’ont enfin eu leur Noël à eux. Depuis le temps qu’ils en rêvaient, les théoriciens du tout sécuritaire, de la « sûreté de l’État ». Leur Patriot Act à la française, ils l’ont eu.
Il a bien fallu un événement de l’ampleur des massacres du 07 au 09 janvier 2015 pour justifier une telle loi ; les américains ont eu leurs Twin Towers, nous avons eu notre Charlie.
Nos trop chers gouvernants ont revêtu leurs nobles manteaux princiers pour pourfendre l’ignoble menace barbare ; et ainsi justifier l’infâme pour combattre l’infamie. Qu’il est joli le tour de passe-passe !
Voilà des années que l’État et ses sbires voulaient mettre la main sur Internet car trop dangereux à leurs yeux. Un espace de liberté, tel que celui-ci, n’est pas concevable dans l’esprit d’un amoureux du pouvoir. Trop nuisible en terme de fuites en tout genre, de campagnes d’opposition politique. Il n’y a qu’à regarder du côté de la Chine ou de la Corée du Nord (régimes où l’opposition est muette), pour voir un Internet cadenassé,censuré, sous contrôle des dirigeants.
Certains crédules diront que nos (pseudo-)démocraties occidentales sont plus matures et plus respectueuses des libertés individuelles, notamment en matière d’expression ; rien du tout mon copain ! La répression est juste un art qui se doit d’être plus subtil et moins brutal au pays des droits de l’homme (sic).
Liberté ! Ils n’ont eu que ce mot à la bouche, depuis le 11 janvier, pour redorer leur blason d’hommes politiques en perte d’altitude sondagière ; et pourtant c’est bien une loi liberticide qu’ils ont fait passer le 16 avril dernier dans les brumes nocturnes de l’Assemblée Nationale.
Article 2 du projet de loi sur le renseignement. C’est le côté technique, accroche toi ami(e) lecteur(trice). Cet article oblige les FAI (Fournisseurs d’accès Internet) comme Free, Bouygues et tous les autres, à accepter l’installation de « boites noires » qui doivent permettre, par des algorithmes,de détecter les comportements suspects sur Internet.
Extrait : « un dispositif destiné à détecter une menace terroriste sur la base de traitements automatisés« , avec une technique qui « ne permet pas de procéder à l’identification des personnes auxquelles ces informations ou documents se rapportent« , mais avec la possibilité de lever l’anonymat des personnes détectées en cas de suspicion, sachant que cette possibilité est d’une simplicité enfantine pour une personne formée.
L’énorme problème réside dans le fait que ces algorithmes sont secrets donc seul les services gouvernement aux peuvent configurer les « cibles » de ces logiciels espions.
Dans le texte, on parle de « terroristes » mais on connaît la manière trop large dont ce mot est utilisé par les gouvernants.Dans la tête du pékin de base comme vous et moi, la propagande d’État, via les médias de masse, nous oriente assez rapidement vers la figure fantasmé de l’islamiste radical égorgeur d’innocents.
Grossière erreur. Outre le fait de consulter des sites djihadistes, le simple fait d’envoyer des e-mails à une personne surveillée, le chiffrement des communications ou l’utilisation de TOR feront partie des éléments pris en compte pour détecter les comportements de terroristes en puissance. Et nous allons être sacrément nombreux dans ce cas !
En bref, officiellement, fini l’anonymat sur la toile, l’État pourra en toute légalité, connaître les sites internet que vous consultez, vérifier le contenu de vos mails, lister vos contacts. Il va falloir redoubler d’imagination pour garder le mystère de nos existences.
Non au flicage du net ! Non au flicage tout court ! Et que ces fossoyeurs n’usurpent plus ce mot : LIBERTÉ !