Ma participation à l’élaboration d’un journal, si modeste et local qu’il soit, m’a amenée à regarder autour de moi, à constater que nous ne sommes pas si isolés et que la presse a de belles pages barbouillées d’encre noire devant elle.

Quand j’ai interrogé assidûment (mais sans violence), les contributeurs du Poing sur leurs habitudes de feuilletage*, le premier titre à avoir été mentionné fut le Monde Libertaire. Il est le cœur de milliers d’anarchistes qui le font, le soutiennent, le lisent. Il est aussi leurs nerfs, leurs tendons et tout ce qui fait réseau. Il fait partie d’une histoire qui nous lie. A l’automne, après 38 ans de publication, il abandonnera sa parution hebdomadaire pour se métamorphoser. Dans l’attente de son retour et à l’heure où Le Poing est en plein work in progress, d’autres périodiques prennent aisément le relais.

Pour la presse générale un incontournable canard, libre et militant, est cité par tout le gratin du Poing : Article 11. Une défunte version papier a été publiée un temps, mais c’est le site web qui perdure avec des articles fournis, illustrés, documentés et très variés. Un de ses amis, CQFD, s’orne d’un chien rouge tous crocs dehors. Tout est dit, le journal papier en autogestion se veut ouvert sur le monde, proche des luttes tout en restant acerbe. L’habillage noir et rouge du mensuel en fait un classique.

Il y a aussi les magazines qu’on emprunte à ses potes. La très belle revue XXI, originale par ses reportages et à l’esthétique très alléchante, présente un hic, un prix justifié mais élevé, pas accessible à tous, et aucun article disponible sur leur site. De la même qualité, le petit frère punk et libertaire Jef Klak, fait plus tonitruant. Sur son site et sur papier tout est fait pour ouvrir nos connexions neuronales et sensitives par des textes, images et sons. A découvrir.

On a aussi les atypiques, les incisives, avec une ligne éditoriale claire, comme Timult. La revue grenobloise, pour finir, est à mettre entièrement au féminin. Elle traite de tout, mais de manière éclairée. Périodicité libre, prix libre, accessible en ligne, elle est, vous l’aurez deviné, très estimée chez nous autres libertaires.

Si nous lisons, c’est pour comprendre et découvrir, pour nous améliorer peut-être aussi. Assise dans un rocking chair et tablette en main, articles et interviews défilants les uns après les autres, je commence à comprendre. Ce qui compte aussi pour ceux qui écrivent et élaborent ces journaux c’est l’expérience du collectif. L’écriture et la lecture ne sont rien sans la volonté de construire communément. Chaque nouveau numéro, des réunions de travail à la distribution, est une petite brique qui élève l’édifice, celui de l’anarchie.

Le chat

* Les titres ne faisant pas consensus ou trop honteux n’ont pas été mentionnés ici.